We Are Lady Parts : elles sont punks, musulmanes et sacrément drôles

We Are Lady Parts : elles sont punks, musulmanes et sacrément drôles

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© Channel4

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Par Delphine Rivet

Publié le

Une série qui a l’énergie d’un set des Riot grrrl, un humour so british et la douceur d’une rom-com.

Lancée en mai dernier sur Channel 4 et présentée dans la catégorie Panorama international au festival Séries Mania, qui se tient actuellement à Lille, We Are Lady Parts est un joyeux tremblement de terre dans le paysage sériel. À la fois récit inédit sur la foi musulmane du point de vue de ses cinq héroïnes, c’est aussi une comédie dont les codes nous sont familiers, sur une bande de filles ultra-attachantes qui courent après leurs rêves. C’est en 2018 que sa créatrice, Nida Manzoor, écrit et réalise le pilote de ce qui deviendra ensuite une série de six épisodes.

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On y suit Amina, musulmane de 26 ans, doctorante en microbiologie et désespérément à la recherche d’un mari. Les prétendants se succèdent dans son salon, toujours en présence des parents. Son père et sa mère ne comprennent d’ailleurs pas vraiment son empressement à vouloir trouver un bon parti. C’est aussi une guitariste émérite, qui réserve ses talents de musicienne au strict périmètre de la maison familiale et, éventuellement, à son futur époux. Enfin ça, c’était avant qu’elle ne se laisse convaincre de rejoindre un groupe de punk rock baptisé Lady Parts.

Il est composé de quatre filles, toutes musulmanes et chacune vivant et exprimant sa foi comme elle l’entend. Car oui, Amina (Anjana Vasan) porte le hijab, tout comme Ayesha (Juliette Motamed) la batteuse du groupe. Momtaz (Lucie Shorthouse), la manager et vapoteuse de weed, revêt le niqab, Bisma (Faith Omole), la bassiste, elle, arbore des turbans en wax, et Saira (Sarah Kameela Impey), la cheffe de bande, préfère les chemises bûcheron et les jeans sans forme. Chacune a sa culture, son background, son éducation, son propre rapport à la foi. Car non, ô surprise, les femmes musulmanes ne sont pas un monolithe.

Une représentation moderne de l’islam

Amina, par exemple, est tiraillée entre son désir d’être un jour une bonne épouse qui ne fait pas de vague, tout en s’époumonant tous les soirs sur scène en chantant “Voldemort under my headscarf” soit, littéralement, “Voldemort sous mon voile”. Et puisqu’on parle du titre des chansons de la série, des compositions originales du frère de la créatrice Shez Manzoor, on vous laisse apprécier : “Ain’t no one gonna honour kill my sister but me” (“Personne ne commettra un crime d’honneur sur ma sœur à part moi”), ou encore “Bashir with the good beard” (soit “Bashir avec la belle barbe”, inspiré de Beyoncé et son “Becky with the good hair”). Il y a quelque chose de délicieusement transgressif ici, non pas envers la religion musulmane, mais plutôt en direction de celles et ceux qui imaginent ses pratiquant·e·s dépourvu·e·s d’autodérision. Nida Manzoor a choisi l’humour, la lumière et la joie.

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De mémoire de sériephile, on n’avait jamais vu ça. Cette représentation moderne de l’islam, portée par des vingtenaires bourrées de paradoxes, défie tous les clichés. Parce qu’à part Ramy, série créée en 2019 par Ramy Youssef et dont le héros est un jeune musulman américain qui se cherche, cette culture et cette religion ne sont jamais dépeintes sous un jour très avantageux dans les séries.

Les femmes musulmanes que l’on nous présente dans les médias ne sont jamais joyeuses, ne se lâchent jamais avec leurs copines, ne sont jamais indépendantes, encore moins féministes… Celles-là, au contraire, sont rêveuses, paumées, délurées, et en colère aussi parfois… comme n’importe quelle femme de leur âge. Elles qui ne sont jamais les héroïnes de leurs propres séries, encore moins des rom-coms, les voilà dans une “buddy comedy” version meufs qui fait voler en éclats les clichés et envoie, au passage, du bon gros son dans les enceintes !

We Are Lady Parts sera disponible à partir du 15 septembre sur la plateforme BrutX.