Solar Opposites, une histoire d’aliens déjantée par le cocréateur de Rick and Morty

Solar Opposites, une histoire d’aliens déjantée par le cocréateur de Rick and Morty

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Par Florian Ques

Publié le

Pour sa nouvelle fiction animée, Justin Roiland propose une sitcom familiale un peu particulière, aussi moderne que référencée.

S’il a fallu attendre aussi longtemps entre deux saisons de Rick and Morty, c’est peut-être, en partie, parce que l’un de ses créateurs planchait sur une tout autre série en parallèle. Pour les besoins de Hulu, la plateforme concurrente de Netflix outre-Atlantique, Justin Roiland a effectivement fait équipe avec Mike McMahan (South Park) pour la délicieuse Solar Opposites. Ou le quotidien d’une “famille” barrée d’extra-terrestres, échouée aux États-Unis et contrainte d’y prendre un nouveau départ.

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Ils sont quatre : Korvo, Terry, Yumyulack et Jesse. Ces aliens à la plastique pour le moins singulière ont dû fuir leur planète d’origine, Shlorp, après la destruction de celle-ci par un astéroïde. Leur échappée les a ainsi conduits sur notre douce Terre, où ils vivent depuis un an dans un quartier pavillonnaire paisible… enfin, jusqu’à ce qu’ils aient débarqué. Pourtant bien installée, cette bande venue d’ailleurs ne s’est pas encore totalement faite aux us et coutumes de la race humaine, et vice-versa.

Impossible de ne pas déblatérer sur Solar Opposites sans évoquer les similitudes avec Rick and Morty. Au-delà de l’aspect cosmique de l’histoire, la nouveauté de Hulu fait état d’un style d’animation somme toute similaire puisqu’on reconnaît tout de go la patte de Justin Roiland. En prime, ce dernier prête sa voix à Korvo, le leader de cette “famille” particulière, qui a notamment quelques traits de caractère en commun avec un certain Rick Sanchez. Et… c’est à peu près tout, puisque Solar Opposites parvient, encore davantage vers la fin de saison, à s’extirper de l’ombre de son aînée pour se forger une identité qui lui est propre.

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Pour ce qui est des disparités entre les deux œuvres, Rick and Morty est de toute évidence plus complexe que sa petite sœur, aussi bien au niveau de son engrenage scénaristique que de sa mythologie. Celle-ci se veut plus profonde, avec des réflexions philosophiques distillées çà et là en sous-texte ainsi que des protagonistes plus torturés. Là où Solar Opposites, elle, opte pour une approche plus décontractée, misant avant tout sur ses atouts comiques, ses références plurielles et généreuses… mais aussi sur une linéarité que Rick and Morty devrait lui envier.

Car aussi géniale que puisse être Rick and Morty dans ses moments les plus solaires, la série animée ouvre des pistes narratives qu’elle explore trop peu, voire qu’elle oublie de refermer – on pense à l’intrigue autour du Evil Morty, laborieuse par moments. Ici, Solar Opposites a l’air de davantage savoir quelle direction elle veut suivre. Cette impression de fil conducteur rondement mené est vérifiée par une première saison cohérente de bout en bout, et surtout sans temps mort.

Dans sa globalité, le dernier bébé de Justin Roiland fait preuve d’un progressisme inattendu. Car si l’on indiquait la notion de famille entre guillemets jusqu’alors pour désigner Korvo et ses compères aliens, c’est bien parce qu’il ne sont pas liés par le sang comme les humains. En effet, dans l’univers fou de Solar Opposites, Yumyulack et Jesse sont respectivement les “réplicants” de Korvo et Terry. Autrement dit, chez eux, il n’y pas de système de procréation. Ils n’ont pas d’enfants mais des “réplicants” donc, créés à partir d’une partie de leur anatomie qu’ils coupent et plantent dans un sol extra-terrestre, comme l’explique le cocréateur Mike McMahan pour Slashfilm.

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Ce concept ingénieux permet à Solar Opposites de changer de tonalité en toute décontraction, altérant à volonté les dynamiques entre les personnages. En effet, Korvo et Terry peuvent passer pour un couple homoparental dans un épisode et s’imposer comme un duo de meilleurs potes dans le suivant. À sa manière, la série d’animation de Hulu contourne et détourne les normes de genres inhérentes à notre société occidentale.

L’autre spécificité de Solar Opposites réside dans la dualité de son récit. En effet, bien que chaque épisode soit essentiellement focalisé sur notre quatuor d’aliens et ses tribulations absurdes, une autre histoire se déroule en toile de fond. Il s’agit de toute une colonie d’humains, tous rétrécis par Jesse et Yumyulack avec un pistolet laser et enfermés ensuite dans une sorte de vivarium sur plusieurs étages. Une communauté classiste s’est alors mise en place façon Transperceneige. Cette deuxième intrigue aussi drôle que fascinante arrive à son apogée dans le septième épisode de la saison, avec un pseudo dénouement qui ne présage que du bon pour la suite.

Car suite, il y aura. La série ayant été commandée pour deux saisons d’une traite en août 2018, Solar Opposites a encore des jours radieux devant elle. Mais au demeurant, elle a déjà fait ses preuves avec cette cuvée inaugurale franchement réussie, parvenant à consolider une mythologie intéressante et abordable tout en adaptant à sa sauce les codes de la sitcom familiale classique. Elle n’est peut-être pas aussi innovante que son aînée, Rick and Morty, mais s’en tire avec les honneurs.

Solar Opposites est disponible sur Hulu aux US depuis le 8 mai dernier, et reste inédite en France.