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M.O.D.O.K., une série Marvel trash en stop motion

M.O.D.O.K., une série Marvel trash en stop motion

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Ⓒ Hulu

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Par Adrien Delage

Publié le

Entre deux séries du MCU, Disney+ propose une œuvre décalée et dévergondée dans l’univers de Marvel.

L’arrivée de Disney+ dans le game des plateformes a bouleversé la donne chez Marvel. Auparavant divisée en deux pour les productions audiovisuelles (Marvel Television et Marvel Studios), la Maison des Idées a désormais donné les pleins pouvoirs à Kevin Feige, l’architecte du Marvel Cinematic Universe. C’est d’ailleurs pour cette raison que les séries Disney+ comme WandaVision et Falcon et le Soldat de l’Hiver ont été intégrées à l’univers étendu, mettant un terme à toutes les œuvres dérivées (et donc non canons) visibles sur ABC, Netflix ou encore Hulu.

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Il restait toutefois encore quelques projets développés et non diffusés pendant la fusion entre les deux parties, dont l’ovni M.O.D.O.K. Cette série animée réalisée en stop motion (ou “animation en volume” dans la langue de Molière) par Stoopid Buddy Stoodios (Robot Chicken, Crossing Swords) n’a absolument aucun lien avec le MCU que l’on connaît. C’est un stand-alone consacré à un personnage peu connu dans nos contrées, et plus souvent défini comme un antagoniste récurrent de Captain America et les Avengers dans les comics. Il faut dire que M.O.D.O.K. a la particularité d’être un savant fou, au cerveau surdimensionné mais au corps atrophié, qu’il a transformé en ordinateur et arme surpuissants – d’où l’acronyme de “Mental Organism Designed Only for Killing” (“Organisme mental conçu uniquement pour tuer”).

La série animée nous fait découvrir son quotidien en tant que leader de l’AIM, une entreprise et organisation criminelle spécialisée dans le trafic d’armes. M.O.D.O.K. passe ses journées à saccager le monde et se confronter à Iron Man et aux autres Avengers, qui le ridiculisent à chaque occasion. Le scientifique diabolique mène aussi une vie de famille pour le moins dysfonctionnelle, puisque sa femme décide de divorcer après un écart de trop. Dépressif et abattu, M.O.D.O.K. doit désormais surmonter une crise existentielle soudaine alors que l’AIM menace de tomber en faillite.

Une série Marvel pas comme les autres

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Très populaire aux États-Unis, l’animation en stop motion n’a jamais vraiment rencontré le même succès en Europe et dans l’Hexagone. Hormis quelques exceptions telles que Chicken Run, Wallace et Gromit et les films animés de Tim Burton, les séries comme Robot Chicken et consorts s’exportent difficilement dans nos contrées. Dans le cas de M.O.D.O.K, il n’est pas simple d’entrer dans cet univers avec un style artistique à la fois étrange et enfantin, complètement inspiré de l’œuvre politiquement incorrecte signée Seth Green et Matthew Senreich. Car comme dans leur série animée culte aux États-Unis, l’animation est là pour trancher avec la tonalité et l’attitude adultes voire vulgaires des personnages.

Contrairement aux productions très familiales du MCU, M.O.D.O.K ne s’adresse pas à tous les publics. C’est une série animée trash, sanglante, parfois graveleuse, qui multiplie les vannes potaches et provocantes. On est loin des anarchistes de South Park mais la série de Jordan Blum et Patton Oswalt n’hésite pas à se montrer grossière. M.O.D.O.K. incarne d’ailleurs un personnage tyrannique, pervers et impulsif, qui se dévoile plus nuancé quand il est en présence de sa famille. La plupart du temps, il est accompagné de ses sbires uniformisés, des sortes de Minions qu’il prend un malin plaisir à rabaisser voire torturer avant de les rafistoler comme il peut.

Très clairement, on ne rit pas à gorge déployée devant le chaos visuel de M.O.D.O.K. Les blagues ne font pas toutes mouche, certaines sont très marquées par une culture américaine pas forcément très accessible et populaire en France, tandis que la série n’a finalement pas grand-chose à voir avec le parcours initiatique d’un super-héros (ou antihéros dans le cas présent) lambda. D’un côté, on peut souligner l’effort de diversité de la part de Marvel ; de l’autre, on se demande parfois s’il ne faut pas consommer des substances illicites pour pleinement profiter de cette zizanie ambiante.

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En revanche, la série peut compter sur le talent indéniable d’un comique américain qui a fait ses preuves : Patton Oswalt. L’acteur et humoriste passé par le stand-up est aussi la voix officielle de productions Disney à succès aux États-Unis, telles que Ratatouille et Comme des bêtes. Il s’occupe personnellement de doubler M.O.D.O.K dans le show, et lui apporte toute l’énergie et la vulgarité nécessaires pour rendre le personnage à la fois drôle et attachant. Il fait de la série une œuvre finalement tragicomique, à la croisée de la sitcom et d’une comédie de bureau british.

L’humour et le genre de M.O.D.O.K. sont difficilement recommandables aux fans de Marvel comme aux néophytes, qui pourraient clairement être bloqués par le style d’animation si particulier de la série. En fin de compte, l’appréciation de l’œuvre dépend réellement d’un aspect subjectif à apprécier ou non le stop motion trash qui prend vie sous nos yeux. Le personnage hydrocéphale de M.O.D.O.K., assez original au sein du panthéon Marvel, reste toutefois intrigant et rappelle parfois la folie méta de Deadpool, avec un attrait partagé pour l’autodestruction et la provocation.

En France, la première saison de M.O.D.O.K. est diffusée sur Disney+, à raison d’un épisode par semaine.