How I Met Your Father peine à marcher sur les pas de la (série) mère

How I Met Your Father peine à marcher sur les pas de la (série) mère

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Par Marion Olité

Publié le

Ce qu’on a pensé des débuts du spin-off de la culte How I Met Your Mother.

Après une décennie de gestation compliquée – faite de changements de cap, de showrunner et de casting –, How I Met Your Father, le spin-off de la sitcom culte How I Met Your Mother diffusée au début des années 2000, a finalement vu le jour sur nos écrans – d’abord sur Hulu, où il a été lancé le 18 janvier dernier, avant une diffusion en France programmée à compter du 9 mars. Alors, oui, on sait ce que vous pensez : voilà une fausse bonne idée et un pari potentiellement perdu d’avance. Un peu comme si Hollywood se lançait dans un reboot de Friends, sans ses acteur·rice·s originaux. Inimaginable ! La différence entre les deux séries repose peut-être sur un concept accrocheur et déclinable pour HIMYM – un protagoniste raconte comment il a rencontré sa moitié et mère, ou ici père, de ses enfants – qui a poussé un diffuseur comme Hulu à se lancer malgré tout dans le projet.

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Haaaave you met Sophie? 

L’heure est donc venue de rencontrer les nouveaux Ted Mosby, Barney, Lily, Marshall et Robin. Et dans le rôle de l’éternelle romantique un peu désespérée mais toujours en quête du grand amour à New York, on retrouve cette fois Hilary Duff, qui va faire la connaissance d’un potentiel love interest, Jesse, incarné par le toujours sympathique Chris Lowell (Veronica Mars, GLOW). Ce nouvel arrivant tient plus ou moins le rôle de Robin, si ce n’est que lui aussi semble désespérément chercher l’amour dans le pilote de HIMYF. Sa backstory est plutôt marrante : ce musicien raté est surtout connu pour avoir créé le buzz sur YouTube en ayant demandé sa copine en mariage et en s’étant pris un râteau.

Le premier épisode reprend plus ou moins les grandes lignes de la série mère en inversant les genres. Ainsi, c’est une Sophie venue de 2050 – interprétée par Kim Cattrall (qu’on a toujours plaisir à voir jouer même s’il est difficile de la décorréler de son rôle de Samantha Jones dans Sex and the City) – qui est bien décidée à raconter à son fils par visio comment elle a rencontré son père.

Dans cette nouvelle mouture développée par un duo de scénaristes et producteur·rice·s en vue à Hollywood, Isaac Aptaker et Elizabeth Berger (Love, Victor, This Is Us), Sophie rencontre sa bande d’ami·e·s dans le premier épisode alors qu’elle vit avec sa meilleure amie, Valentina (Francia Raisa). Cette dernière vient de rencontrer un nouvel amour en la personne de Charlie (Tom Ainsley), un aristocrate anglais déchu dégoté lors de la dernière Fashion Week de Londres. Le même jour donc, par le truchement du hasard, Sophie se retrouve dans un Uber conduit par Jesse, et débarque à une soirée de fiançailles entre Sid (Suraj Sharma), le meilleur ami de Jesse, et sa promise, Hannah (Ashley Reyes). Également nouvelle venue dans la Grosse Pomme après un divorce douloureux avec son épouse, on compte Ellen (Tien Tran), la sœur adoptive de Jesse. On va suivre tout ce beau monde, entre coups de cœur et déceptions, aux quatre coins de New York.

Des débuts trop timides

N’y allons pas par quatre chemins : les débuts de Sophie, Jesse et les autres sont plutôt timides. Le pilote de How I Met Your Mother, que nous avons revu à l’occasion, a ses défauts (dès sa première apparition, le personnage de Barney est problématique, il exotise les femmes asiatiques et libanaises pour la blague) mais aussi ses qualités. Une sitcom doit faire rire, ou du moins sourire, et de ce côté-là, les scénaristes de HIMYF manquent leur cible, peut-être par peur de s’y prendre mal. On les comprend, on n’est plus en 2005 et certaines blagues ne passeraient absolument plus aujourd’hui, la société a changé et est même en pleine transition. Cela ne veut pas dire pour autant que l’humour est mort et qu’on ne peut pas créer des séries hilarantes en 2022 !

Au visionnage des premiers épisodes, on ne peut s’empêcher de constater qu’il manque des punchlines (le “Suit up” de Barney par exemple, le “Literally” de Ted…) qui étaient présentes dans la série originale. Notons toutefois qu’entre le premier et le troisième épisode, la série se détend un peu et certaines situations comiques, comme le moment où Jesse pose de façon hyper maniérée pour Sophie (qui est photographe) pour son profil Tinder, fonctionnent bien. Il faut dire aussi qu’HIMYM innovait en son temps avec ses pauses et ses retours en avant et en arrière incessants : en 2004, c’était fresh, mais en 2022, ce type de montage sent presque la naphtaline s’il ne s’accompagne pas d’une vision artistique forte. Et c’est pour le moment exactement ce dont manque How I Met Your Father, comédie un peu cucul qui manque de punch.

Par les temps qui courent, on ne dit pas non à de bons sentiments et aux séries feel good (en témoigne le succès de shows comme Ted Lasso) mais encore faut-il qu’on s’attache aux personnages. Et pour le moment, ils ne sont pas assez bien caractérisés pour que ce soit le cas. Le duo mal assorti formé par Ted et Robin fonctionnait car il jouait en réalité sur ce qu’on attend des codes genrés : Ted était l’éternel romantique qui dit “Je t’aime” à Robin dès le premier date, tandis qu’elle ne voulait surtout pas s’engager et était assez rentre-dedans dans son caractère. Dans le reboot, Sophie et Jesse veulent la même chose et ont des personnalités beaucoup trop proches de “gentils petit chats” un peu plates.

Les seconds rôles pâtissent aussi de la comparaison avec l’originale : Lily et Marshall ont de super répliques dès le premier épisode, et une alchimie incroyable. C’est plus laborieux pour Sid et Hannah, qui vivent en plus une relation longue distance. Cela donne lieu à quelques blagues pas dingues, au mieux. Ellen, la sœur lesbienne de Jesse un peu trop enthousiaste, a du potentiel en nouveau Barney version weirdo, tout comme l’aristo anglais Charlie : ces deux-là, les plus over the top, sont pour le moment les personnages les plus prometteurs car les mieux dessinés.

Difficile aussi de ne pas voir dans la composition du casting une exigence de quota à la diversité : un personnage d’origine mexicaine, un autre d’origine indienne, une autre à la fois lesbienne et d’origine asiatique histoire de cocher deux cases en même temps (diversité + LGBTQ+). Ne vous méprenez pas : on est évidemment pour davantage d’inclusivités sur les écrans, malheureusement ici, les personnages ont tout des “token“, uniquement là de façon cosmétique. Ils restent en périphérie des héros blancs (Jesse et Sophie) et peu d’entre eux sortent du lot. Cela étant dit : le manque de répliques vraiment drôles frappe tous les protagonistes sans distinction !

Pour le moment donc, How I Met Your Father ne déjoue pas les pronostics et s’avère plutôt décevante, surtout en comparaison de l’originale. Elle manque de saveur, de partis pris forts et de répliques qui claquent. Elle ne possède pas le ton de l’originale, qui était hyper dynamique à tous les niveaux (le montage, les dialogues, les interprètes). Mais elle n’est pas non plus désagréable à visionner. En soignant davantage son aspect comique et en structurant mieux ses personnages, elle pourrait creuser avec bonheur son sillon bienveillant (le cynisme n’est plus vraiment tendance, de toute façon). Les fans de HIMYM pourront s’amuser à trouver des clins d’œil ici et là (le pub, l’appartement, etc.), mais pour apprécier HIMYF, il faut accepter d’emblée qu’elle ne sera pas aussi légendaire que son illustre modèle.

La première saison de How I Met Your Father, composée de dix épisodes, sera diffusée en France sur Disney+ à compter du 9 mars.