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AlRawabi School for Girls : la vengeance est un plat qui se mange froid

AlRawabi School for Girls : la vengeance est un plat qui se mange froid

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©Netflix

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Par Farah El Amraoui

Publié le

Une série choc, loin des teen shows qu’on a l’habitude de voir.

TW : cette série et cette critique évoquent des violences au lycée, notamment du harcèlement scolaire.

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Netflix connaît, depuis ces dernières années, une multiplication des créations originales provenant de différents pays. Espagne, Italie, Japon ou encore Corée du Sud, la diversification des séries continue de se développer et c’est maintenant au tour de la Jordanie de nous livrer une création plutôt réussie.

AlRawabi School for Girls est une série jordanienne réalisée par Tima Shomali et Shirin Kamal. Sortie le 12 août dernier sur Netflix, elle est la deuxième création originale issue du Moyen-Orient après la série Jinn. Elle aborde les questions liées au harcèlement dans un établissement réservé exclusivement aux jeunes filles. L’excellence et la discipline résument la réputation de cette école. Toutes les règles doivent être respectées et la tenue des jeunes étudiantes est par ailleurs inspectée minutieusement chaque matin. Nous allons y suivre l’histoire de Mariam (interprétée par Andria Tayeh), élève studieuse et victime de harcèlement scolaire plus que conséquent par trois de ses camarades : Layan (Noor Taher), Roqayya (Salsabiela) et Rania (Joanna Arida). Ce trio est en plus presque intouchable grâce à la réputation du père de Layan. Elles profitent d’ailleurs de ce privilège pour harceler toute personne se trouvant sur leur chemin, tout le monde y passe même les femmes de ménage.

Les conséquences d’un harcèlement incessant

Mariam va dès lors devenir le bouc-émissaire de ce fameux groupe. Cependant, le harcèlement va prendre une tournure dramatique qui va pousser Mariam à se faire agresser par ses camarades. Dès lors, le ton monte, l’ambiance devient de plus en plus sombre. Les conséquences psychologiques de cet événement vont pousser Mariam à bout. Elle ne désire plus qu’une chose : se venger. La jeune fille souriante et sympathique va se transformer et ne sera plus que consumée par la haine. Elle est accompagnée de sa meilleure amie Dina (Yara Mustafa) mais aussi d’une nouvelle élève au sein de l’école, Noaf (Rakeen Saad).

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Noaf, un temps silencieuse car virée de sa précédente école et souhaitant faire profil bas, ne pas supporte pas le harcèlement perpétué par ses camarades. Elle va donc aider Mariam dans son plan pour assouvir sa soif de vengeance. Elles finiront par être rejointes par Dina. Le plan est minutieusement ficelé, les filles veulent se débarrasser des trois jeunes femmes, quelles que soient les conséquences. Elles veulent aussi surtout mettre fin définitivement à l’impunité dont bénéficie le trio.

Si l’on ressent un certain plaisir à assister à la vengeance de Mariam, plus la série avance et plus les conséquences s’alourdissent. Le malaise est certain. Est-ce finalement la bonne solution ? Les deux réalisatrices parviennent à apporter de la nouveauté aux teen shows habituels avec un casting presque entièrement féminin et une bande-son principalement arabe. 

Honneur et masculinité toxique

Ce que l’on constate au travers de cette série, c’est qu’il y a un dysfonctionnement au sein de la société jordanienne. Outre la question du harcèlement, AlRawabi School for Girls explore aussi la différence de traitement entre les filles et les garçons. La question de “l’honneur de la famille” revient de multiples fois : lorsque la relation de Layan avec un garçon finit par être découverte ou quand Ruqayya fait l’erreur d’envoyer une photo d’elle sans son voile (on note une nouvelle fois cette obsession de retirer le voile d’une protagoniste voilée dans une série, afin de voir ses cheveux).

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La série révèle que le harcèlement est également le produit d’un problème plus profond au sein des relations familiales. Même s’il est difficile de ressentir de la pitié envers les coupables, on ne peut s’empêcher de reconnaître qu’elles sont humaines et que leurs vies sont loin d’être parfaites. Parents colériques et manque de communication, nos protagonistes sont toutes sujettes à des situations familiales compliquées et c’est ce qui fait une partie de l’authenticité de cette série.

Tina Shomali et Shirin Kamal parviennent ainsi à montrer que l’obsession de “l’honneur” peut avoir des conséquences dramatiques. La pression qui pèse sur les jeunes filles est telle qu’elles savent qu’elles n’ont pas le droit à l’erreur au risque de décevoir leurs parents. Il faut s’accrocher car la série ne nous ménage pas. Les personnages sont autant détestables qu’humains, et on se rend compte que n’importe qui peut devenir la personne qui harcèle. La victime d’hier peut devenir le bourreau du jour.

La première saison de AlRawabi School for Girls est disponible sur Netflix.